« Depuis plusieurs années, le Burkina traverse une crise sécuritaire profonde. Des régions entières, situées au nord du pays et principalement dans la région des « trois frontières » (Mali, Burkina, Niger) sont devenues dangereuses et inaccessibles pour une partie de la population. Les attaques des djihadistes/hommes armés contre les villages sont nombreuses, les populations obligées de fuir du jour au lendemain, laissant tout ce qui constitue leur richesse derrière elles : maisons, troupeaux, champs… Ce sont des familles entières qui fuient vers les villes, d’abord celles du centre du pays (Kaya, Ouahigouya, Kongoussi) puis vers les plus grandes agglomérations, comme Ouagadougou ou Bobo-Dioulasso, à la recherche d’un espace sécure, où se mettre à l’abri et protéger leurs enfants.

Arrivées démunies à Ouaga, ces familles sont hébergées par des résidents installés en ville depuis quelques années et qui sont originaires des mêmes villages. Ces familles hôtes ont parfois, elles-mêmes également, des difficultés à assurer le quotidien. Malgré tout, le système de solidarité, mis à rude épreuve, tient bon !! Les nouveaux arrivants peuvent compter sur la solidarité endogène, légendaire au Burkina.

Marie Benketaf en maraude avec KEOOGO

Aujourd’hui, le CONASUR (Conseil National de Secours d’Urgence et de Réhabilitation) reconnaît la présence de ces Personnes Déplacées Internes (PDI) dans les grandes villes comme Ouaga et Bobo. Parce qu’il suffit d’ouvrir les yeux dans les rues de Ouaga pour constater la recrudescence du phénomène d’enfants des rues… Ces gamins, parfois âgés d’à peine 6 ou 7 ans, qui profitent d’un feu rouge pour interpeller les conducteurs et mendier leur pain quotidien… Ils sont des centaines, des milliers.

Cette reconnaissance officielle est une première étape, essentielle pour accéder à l’aide humanitaire. Les fonds internationaux parviennent au nord du Burkina, mais la prise en charge de toutes ces populations extrêmement fragiles et vulnérables à Ouaga et Bobo, est insuffisante. Nos partenaires, sur le terrain, KEOOGO à Ouaga et le DISPENSAIRE TROTTOIR à Bobo font ce qu’ils peuvent pour faire face à l’afflux de tous ces enfants… Les besoins sont immenses : prise en charge médicale, accompagnement psychologique post-traumatique, protection et soutien juridique pour les femmes et les jeunes filles – trop nombreuses – qui subissent des Violences Basées sur le Genre (VBG), distribution alimentaire, accès à l’éducation… Face à toutes ces difficultés, ils ne baissent pas les bras, ils s’arment de courage (quand d’autres prennent les kalach’) et protègent les enfants, favorisent leur bien-être et contribuent à bâtir une société meilleure, avec le vœu d’un Burkina en paix… Bonne chance à eux et merci pour cet engagement renouvelé, cette leçon de courage et d’abnégation dans des conditions de travail ô combien stressantes… Des héros du quotidien, des héroïnes de tous les jours. « Aw ni tié », « barkousso » (cela signifie « merci » en langue dioula et en langue moorè, deux des principales langues parlées au Burkina.) »

Marie Benketaf, Responsable suivi de programmes Afrique, en mission au Burkina Faso du 15 au 21 mai 2023.

* Le nom « Burkina Faso » est un mélange entre les langues moorè et dioula. « Burkina » signifie « hommes intègres » en moorè et « Faso » signifie « maison de mon père » en dioula, dans le sens de patrie/pays.